"Retables", texte ecrit par un collectif

  • Matériaux :bois : faux marbre et polychromie
  • Structure architecturale
  • Evolution
  • Emplacement dans l’édifice

Matériaux : faux marbre et polychromie

L’ensemble des retables de Flandre française constitue un corpus homogène, formant à l’intérieur de l’arrondissement de Dunkerque, de la mer du Nord à la Lys, un ensemble de près de 150 œuvres réparties dans une cinquantaine d’églises. Leur cohérence vient de l’unité de leur époque de construction, les XVII° et XVIII° siècles, de leur structure architecturale et de leur matériau de construction, le bois.

Les forêts de Nieppe et de Clairmarais pouvaient fournir le chêne, dont sont faits les lambris, les confessionnaux, les chaires, les tables de communion et certains retables qui, cirés ou vernis, reçoivent éventuellement quelques rehauts de dorure. Mais là où l’on croit voir le marbre et le bronze on rencontre encore le bois, la peinture, la dorure. La structure, sans exclure parfois le recours à quelques éléments en chêne, est constituée de planches de bois résineux, matériau d’importation qui fait l’objet d’un commerce traditionnel depuis le Moyen Age entre les pays nordiques et Dunkerque.

La statuaire et le décor d’applique sont réalisés dans des bois locaux, arbres isolés ou arbres de haie, essentiellement des tilleuls, mais aussi des aulnes, des bouleaux, des peupliers, des ormes.

La polychromie apporte à l’ensemble une cohérence finale. Des détails sont relevés d’or et accrochent la lumière.

Structure architecturale

Un retable est un ornement dressé verticalement derrière la table d’autel, qui a pour but de soutenir et d’orienter la dévotion des fidèles à l’aide des représentations. Cette définition fixe une fonction, il ne peut y avoir de retable sans autel, et laisse la forme libre de varier suivant le temps et le lieu.
La forme la plus communément associée à l’idée de retable étant les triptyques et les polyptyques peints ou sculptés universellement répandus dans l’Occident médiéval. Toute cette production reste du domaine de l’objet d’art aisément déplaçable.

Evolution

A partie de la 2ème moitié du XVI° siècle, en concordance avec l’affirmation de la Contre-Réforme catholique apparaît une nouvelle famille de retables monumentaux, à caractère triomphal, dont la composition est inspiré d’ouvrages d’architecture. Les retables de Flandre française appartiennent à cet ensemble.
Les atroces guerres politico-religieuses qui ont ravagé la Flandre dans la 2ème moitié du XVI° siècle avaient provoqué la destruction ou la mise à mal d’un grand nombre d’églises.
La reconstitution de patrimoine religieux intervint en deux temps : dès les années 1590 et pendant toute la première moitié du XVII° siècle, les édifices sont rebâtis ou restaurés ; c’est à ce moment que le type d’église-halle subdivisé en deux parties, celui à tour centrale et celui à tour porche, tend à devenir majoritaire.
Puis l’ameublement est réalisé progressivement dans la 2è moitié du XVII° siècle : le très riche décor des églises flamandes tel qu’il existe encore aujourd’hui, statues, tableaux, lambris, confessionnaux, tribune, orgues, chaires, tables de communion et surtout les retables, bien qu’amoindri par les guerres, la modification du goût et l’évolution de la liturgie, se met alors en place.
Les retables baroques flamands se sont élevés après la période des incertitudes et des controverses au sein d’une stabilité et à cause d’elle. L’art baroque est le dernier art globalisant pour l’expression de la foi chrétienne. L’architecture des retables inspiré directement de la Contre-Réforme ou la Réforme catholique est tout le contraire d’un instrument improvisé pour les besoins d’une lutte : c’est le miroir d’un système que l’on sent, à l’époque, comme complet et définitif
La Réforme catholique propose le modèle du bon chrétien et aussi du bon prêtre.
La religion encadre le fidèle du berceau à la tombe. Le catholique des Pays-Bas est intégré à sa communauté, à la cité et à l’Eglise.
L’ère des tâtonnements est close. Certes la catholicité est amputée par le départ de tous les chrétiens qui se sont tournés vers la réforme protestante, mais cette catholicité est confirmée et rénovée.

Emplacement dans l’église

L’emplacement des autels-retables est évidemment fonction du plan du bâtiment. Le plan le plus fréquent, celui de l’église-halle, se caractérise par l’existence de trois vaisseaux de hauteur et de largeur sensiblement égales, sans véritable transept ni chapelle latérales ou absidiales.
Les trois absides accueillent chacune un autel, maître-autel au centre, autels secondaires de part et d’autre, accompagnés de leur retable.
L’église flamande réserve donc au fidèle ou au visiteur qui remonte l’allée centrale la vision simultanée de ces trois grands retables. Cette scénographie est encore plus frappante lorsque les deux retables latéraux fonctionnent en pendants ou jouent d’effet de symétrie.
Aux trois retables de chœur, s’ajoutent parfois des petits retables secondaires fréquemment adossés aux piliers à l’entrée du faux transept ou à la croisée.

Sur l’autel est posé un tabernacle. Sa présence à cet endroit est nouvelle. Avant la Contre-Réforme les hosties étaient généralement conservées dans une armoire dans le mur ou dans une tour eucharistique comme il en subsiste une à Flêtre.
Une exposition surmonte souvent le tabernacle. Elle peut pivoter dévoilant plusieurs positions : pour l’Eucharistie, pour la croix et parfois une troisième pour les reliques.
Bibliographie
Luc DELEPLANQUE , abbé, Le Catholicisme Tridentin dans les Pays Bas du Sud, Cours donné dans le cadre de la
session de formation de guides, Merville, septembre 2001.
Geneviève DUPREZ , "Architecture et Trésors des Eglises de Flandre", Association Retables de Flandre, 1997.
Philippe HERTEL, Anita OGER-LEURENT . "Les retables de Flandre française des XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles" : contexte spirituel et historique, Réforme et Contre-Réforme ; essai de typologie. In 11es JOURNEES
D'ETUDES DE LA SECTION FRANÇAISE DE L'INSTITUT INTERNATIONAL DE CONSERVATION (S.F.I.I.C.). Colloque international (2004 ; Roubaix). Retables in situ, conservation et restauration. Champs-sur-Marne : Section française de l’Institut international de Conservation, 2004, p. 15-32